Discussion 8 Poésie et voyage

Conférencier / conférencière

Discussion 8 (après Ph. Moret et Aline Bergé) Véronique Magri-Mourgues s'interroge sur le fait que la citation soit un procédé de distanciation qui tend à sacraliser la référence introduisant une certaine solennité. Aline Bergé rappelle que Jacottet considère la poésie comme une matière grave c'est là le signe de son inquiétude, de son ironie décapante qui lui fait rejeter toute tentative de poétisation : ceci est lié à sa gravité et à son soucis de justesse. Lestringant demande si le phénomène de la translation entre la poésie et le voyage (qui évoque en soi le voyage) ne permet pas d'instaurer une dimension ironique. Quelle est la place de la translation ? Aline Bergé précise que Jacottet s'affranchit des règles du genre : quand il est passé à la prose poétique il a privilégié l'approximation systématique. Lestringant demande s'il n'y a pas une analogie entre le voyageur et le traducteur ? A. Bergé fait remarquer que Jacottet a choisi des fragments courts pour rendre la lecture accessible contrairement aux choix des poètes contemporains qui privilégient l'hermétisme... Lestringant avoue que sa question est un peu abstraite mais reformule son interrogation en indiquant que le mouvement né de la translation vient peut-être de l'expérience viatique elle-même... Sarga Moussa constate que Ph.Moret a présenté un Michaud à rebrousse-poil, un contre-contre Michaud pour proposer une lecture constructive. S. Moussa approuve mais se demande si l'on ne peut pas dire tout et son contraire à propos des alexandrins qui n'en sont pas ou qui en sont (11, 13, 16 syllabes). En fait sommes nous en présence d'une continuité de la poésie classique ou d'une rupture ? A propos du cheval qui est un pégase, Moussa signale son origine aristocratique et suggère un rapprochement avec Lamartine qui était un passionné des chevaux, il s'est même ruiné en achetant des chevaux. Moussa se demande au terme de cette deuxième journée du colloque si l'on peut voyager sans faire de poésie. Existe-il un poète qui aurait fait un voyage en ayant résisté à la tentation de la poésie ? Michaud lui a résisté... Venayre avoue qu'il aurait bien aimé citer Ecuador mais il a l'impression de ne pas comprendre ce texte. Pourquoi Michaud refuse-t-il de dire l'extraordinaire de son voyage ? Moret fait remarquer que Michaud évoque dans son voyage en Amérique du Sud les dangers, les maladies. Venayre constate que seuls les moustiques surgissent comme une vague menace... Moret considère qu'en fait il y a un jeu de cache cache que Michaud établit entre la poésie et le voyage. Lançon à son tour pose la question de la rétention mesurée de Jacottet à l'égard des mots. En Egypte, il est mal... Comment voyez vous ce blason de l'Egypte ? Il y a en effet une énigme sur l'Egypte. Il était conquis d'avance mais l'épreuve le déçoit. Bergé considère qu'il cherche un mirage au Caire et qu'il parvient malgré tout à transcrire une figure abstraite. Son itinéraire en Egypte est en fait composé de réminiscences heureuses. Pour Lançon, Jacottet s'est en fait rendu compte que ce qu'il a vécu/vu ne correspondait à rien, ni à un quelconque référent culturel (pictural...) ou réel. Bergé rappelle que Jacottet n'a cependant pas défait ce qu'il a écrit. La figure du dieu-potier renvoie par exemple à cette inquiétude qui lézarde tout, peu à peu. L'envolée du métaphysique émerge, d'après Lançon, de ce parcours. La perspective de Jacottet est en fait intuitive. Jacottet se demande pourquoi la Grèce lui a tant plu contrairement à l'Espagne et à l'Egypte. En fait il a été séduit par la place de la figure humaine dans le monde grec. La Grèce est l'espace de l'homme. Lançon constate également qu'avec Jacottet on entre dans l'idée du voyage comme promenade, comme marche dans ce voyage du proche. Bergé rappelle que le voyage en Provence s'effectue sur la voie de la Grèce, en résonnance... Maryse Jacob ne trouve pas étonnant que Jacottet évoque la forêt et le rocher comme paysage autrichien dans la mesure où Adalbert Stifter en parle énormément dans ses récits. Bergé précise cependant que le travail de Jacottet consiste à rendre anonyme cet univers autrichien pour reconstruire son univers poétique. En fait Jacottet a une vue assez large des poètes autrichiens, tel Walter von Vogelweide, Ozwald von Wolkenstein, Georg Trakl et Thomas Bernard. Ce que Jacottet entreprend c'est en réalité une entreprise de valorisation des poètes méconnus ou mineurs.

Référencé dans la conférence : 12e Colloque international du CRLV : Poésie et Voyage
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