La course en Méditerranée : les discours sur la captivité et la servitude

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La course, pour aussi ancienne qu'elle ait été en Méditerranée, devint endémique dès l'irruption des Ottomans dans le bassin occidental. L'arrêt de l'expansion ottomane avec l'échec du Grand Siège de Malte en 1565, puis le cantonnement des Turcs dans le bassin oriental à la suite de la défaite de Lépante en 1571, libéraient les Régences barbaresques d'une sujétion qui aurait pu être lourde. En quelques décennies, les représentants du Sultan y furent limités à une distinction purement honorifique et des pouvoirs militaires, d'origine turque ou "turque de profession" comme on appelait alors les renégats, s'imposèrent aux populations locales, berbères ou arabisées, et assirent un système politico-économique reposant sur l'omniprésence de l'armée et de la marine et sur une économie de prédation.
La course exprimait à la fois l'incapacité de ces élites militaires à s'insérer dans une économie de type commercial qui s'imposait alors partout en Méditerranée et l'impossibilité du monde ottoman et barbaresque de mener des actions militaires autres que la guérilla maritime. La course était donc une sorte de guerre froide ponctuée d'escarmouches dans laquelle chacune des parties s'emparait des biens et des hommes de l'autre. Ces biens devenaient alors l'objet d'un intense négoce de revente et de redistribution dont les acteurs les plus importants furent les Juifs de Livourne et leurs filiales tunisiennes, anglaises ou hollandaises.
Il restait les hommes, de toutes classes et catégories, échangeables, vendables ou corvéables. Dans un système où la machine n'avait pas encore une place éminente, la main-d'œuvre était essentielle. Mais dans un monde où la foi gardait son importance et où la liberté de l'homme commençait à acquérir la sienne, le rachat des esclaves (chrétiens ou musulmans) devint une préoccupation essentielle. À côté du récit des confréries chargées de ce rachat, il y a celui de ceux qui ont été rachetés, mais aussi ceux des consuls qui tempèrent parfois les premiers. La servitude en Barbarie apparaît alors aussi diverse que les situations humaines. Les actes de Bonaparte, lors de la prise de Malte, puis son discours en tant que Premier Consul, mirent un terme aux ambiguïtés de perception de la course : l'esclavage des Européens comme des Barbaresques était définitivement condamné comme une expression de la barbarie d'un autre âge, au moment même où le Consulat revenait sur la suppression de l'esclavage des Noirs proclamée par la Révolution à l'instigation de l'abbé Grégoire.

Publications sur les voyages
Ouvrages

Malte, Paris, Arthaud, 1991, 1996 (2e édition).
Gallicanism and the Order of St John, Malte, P.E.G., 1992.
Grèce, Paris, Arthaud, 1994.
Chypre, Paris, Arthaud, 1996.
Histoire de Chypre, Paris, P.U.F., Que sais-je ? n°1009, 1998.
Lettres écrites de Malte par l'abbé Boyer, chapelain conventuel de l'Ordre, L'Harmattan. À paraître.
La Régence de Tripoli de 1552 à 1793. Son expansion au Fezzan, Bouchene. À paraître.
Hugues Loubenx de Verdalle, cardinal et Grand Maître de l'Ordre de Malte (1581-1595), Plon. À paraître.

Articles

"La France et Malte au XVIIIe siècle : le problème de la double 'nationalité'", in Malta, a case study in international cross-currents, Malta University Press, 1991, p. 174-186.
"Un pamphlet scandaleux contre Malte et l'Ordre de Malte : L'Ordre de Malte dévoilé du pseudo-Carasi (1790)", Melita historica, XI, 1, 1992, 59-76.
"Malta and France, 1789-1798 : the art of communicating a crisis", in Victor Mallia Milanes, Hospitaller Malta, Malte, Mireva, 1993, p. 659-685.
"Mikiel-Anton Vassalli et les réfugiés maltais, principaux agents de la culture du coton en France (1807-1814)", Journal of Maltese studies, 23-24, 1993, p. 201-214.
"Malte et l'Ordre de Malte dans les affaires polonaises et russes au XVIIIe siècle", Revue des études slaves, LXVI/4, 1994, p. 733-755.
"L'Ordre de St Jean et l'essor économique de Malte (1530-1798)", Revue du monde musulman et de la Méditerranée, 71, 1994/1, p. 75-90 et p. 243-253.
"Chivalry and the chivalric revivals", in The Maltese Cross, Malte, Tony Curtis, Malta University Publishers, 1995, p. 169-174.
"The first draft of a Maltese constitution (1799)", Library of Mediterranean studies, 1, 1995, p. 243-253.
"Paul Ier de Russie, l'Ordre de Malte et le catholicisme", Revue des études slaves, LXX/2, 1998, p. 411-430.
"Malte, enjeu diplomatique européen au XVIIIe siècle", in Méditerranée, mer ouverte, actes du colloque de Marseille (21-23 septembre 1995), tome I, p. 109-121, 1998.
"Les juridictions consulaires d'Ancien Régime : l'exemple des juges et consuls de Paris, ancêtres des tribunaux de commerce", in Consolati di Mare and Chambers of Commerce, Malte, International Maritime Law Institute, 1998.
"Le voyage et les aventures de Carasi à Malte, d'après L'Ordre de Malte dévoilé (1790)", in S. Linon-Chipon, V. Magri-Mourgues et S. Moussa., Miroirs de textes. Récits de voyage et intertextualité, Publications de la Faculté des Lettres, Arts et Sciences humaines de Nice, Nouvelle série, n° 49, p. 229-241, Nice, 1998.
"Malta and sailing ships in the Galaxidi Museum" in Greece, Treasures of Malta, Summer 1998, p. 53-56.
Présentation des lettres maltaises de l'abbé Boyer, in François Moureau, Répertoire des nouvelles à la main. Dictionnaire de la presse manuscrite clandestine, XVIe-XVIIIe siècles, Oxford, Voltaire Foundation, 1999, p. 175-177.
"L'Ordre de Malte, miroir brisé de la noblesse française des XVIIe et XVIIIe siècles", in Etat et société en France aux XVIIe et XVIIIe siècles. Mélanges offerts à Yves Durand, Paris, Presse de l'Université de Paris-Sorbonne, 2000.

Référencé dans la conférence : 13e Colloque International du CRLV : L'Aventure maritime
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