Nicolas-Antoine Boullanger (1722-1759) : de quelques Anecdotes physiques de l'histoire de la nature... à lire dans le marbre

Conférencier / conférencière

Parmi les voyages des ingénieurs-physiciens à l'intérieur de la croûte terrestre, aux XVIIe et XVIIIe siècles, celui de Nicolas-Antoine Boullanger prétend à des visées bien singulières. Avant lui, Sténon, minéralogiste, parti en Toscane observer les fossiles animaux et végétaux, en avait ramené le principe de la « continuité des strates ». Leibniz, ingénieur des mines, était revenu de son exploration des sous-sols miniers du Harz, convaincu de ce que la terre aurait primitivement été embrasée, sculptée par les mers, puis par les flux diluviens des torrents. Gautier, « architecte-ingénieur, et inspecteur des grands chemins, ponts et chaussées », tira de ses déplacements, et des tourbillons cartésiens, de nouvelles conjectures sur le globe. C'est un fait, les explications de la formation du relief de la terre que proposent ces ingénieurs, limitées au champ scientifique qui leur est propre, demeurent prudemment, le plus souvent, dans le cadre de la chronologie biblique.
S'il n'ignore aucune de ces théories, Boullanger, collecte ses Anecdotes physiques de l'histoire de la nature, résolument, hors de ces sentiers battus. A partir de ses observations de la montagne de Langres, il entend démontrer l'origine cataclysmique, et torrentielle, des « irrégularités » du plateau. Puis, « marteau à la main », il donne à lire dans un bloc de marbre, l'histoire de sa formation, celle des montagnes, et la naissance du bassin de la Méditerranée. De sorte que, à partir de « faits sensibles » et de leurs enchaînements, il recompose, à l'écart des récits « fabuleux des textes sacrés » et de toute chronologie, une histoire des anecdotes de la terre ; le déluge biblique n'y représente plus qu'un phénomène diluvial local.
Certes, les théories « cataclysmiques » de Boullanger, comme celles de ses contemporains, furent atteintes, dès avant la fin du XVIIIe siècle, d'inanité scientifique. Il convient cependant d'en retenir le caractère novateur de l'épistémologie du « fait sensible », en matière de physique de la terre ; elle a contribué à faire du jeune philosophe le pionnier de la géomorphologie.

Référencé dans la conférence : Relations savantes
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