Asie et Orient - vraies questions pour faux semblants
Résumé
La notion d’Orient est tellement vague dans son acception courante mais parfois, aussi, savante, que Orient et Asie sont souvent confondus. En effet, alors que l’Asie correspond à un continent, l’Orient est une direction (celle du soleil levant) qui n’a de sens, pour désigner l’Asie, que depuis l’Europe (en Amérique, l’Asie est plutôt à l’Ouest). Or le Maghreb, qui est au Sud de l’Europe, fait partie de l’Orient. En fait, dès l’Antiquité gréco-romaine, l’Occident s’est constitué un double imaginaire appelé « Orient » qui était paré soit de toutes les vertus, soit de tous les vices, et qui se superposait plus ou moins à l’Asie réelle. De siècle en siècle et en dépit du fait que cet « Orient » coïncidait de moins en moins avec l’Asie (surtout à partir de l’expansion musulmane), Orient et Occident sont devenus des alter ego dans l’imaginaire européen, les deux faces d’un même « être ». Si bien que pour tout Européen contestant sa propre civilisation, l’Orient apparaissait comme un modèle fascinant ; au contraire, tout défenseur des valeurs de l’Europe chrétienne diabolisait un Orient jugé corrupteur. Finalement peu importait le contenu de ces Orients-là : l’ennemi oriental (ou l’idéal oriental) était tantôt musulman (du Maghreb comme de Perse), tantôt bouddhiste, confucianiste, taoïste (de l’Inde au Japon en passant par la Chine et l’Indochine), tantôt biblique (Jérusalem), tantôt drôlement chrétien (Byzance /Constantinople)... Quel point commun entre ces différentes facettes de l’Orient ? Quel rapport avec l’Asie ? L’Asie n’était souvent qu’un prétexte pour l’Occident à parler de lui-même en dressant devant lui un adversaire (l’Orient) contre lequel s’appuyer au bord du vide qu’il ressentait. Presque toute nouvelle perception de l’Asie en vint assez vite à se conformer au schéma binaire d’attraction et de répulsion. Ainsi l’Orient est-il une projection imaginaire dont l’Occident s’est servi au cours de l’Histoire pour donner le change à ses angoisses ou pour entretenir un espoir idéalisé, celui d’une identité rêvée : la sienne.
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