L’ESPRIT DU VOYAGE (audio)

Enregistrement réalisé le 27/05/2007 lors du festival Etonnants Voyageurs (durée 16’16)

L’ESPRIT DU VOYAGE OU LE GÉNIE DE LA PERTE
Conversation entre Gilles Lapouge et André Velter

 

Pour le lecteur, rompu aux longues plages de solitude, à ces heures qu’on dit parfois perdues – à force de bonheur – se rendre à un festival de littérature est une tentation tenace en même temps qu’une expérience étrange.

Une expérience de plus en plus commune, cependant, car les festivals de littérature se multiplient. A l’instar du théâtre, du cinéma et de la musique, le livre ne se contente plus de tenir salon, il crée lui aussi l’événement, souvent qualifié d’international, avec ce que ce statut peut engendrer en terme d’affluence et de presse. Une tentation tenace donc car ils donnent l’occasion d’écouter les écrivains discourir, proclamer, polémiquer ou lire. L’étrangeté vient du fait qu’écouter parler de littérature donne parfois l’impression de retomber dans ce qui n’est même plus le grand récit mais la grande causerie quotidienne. Nous sommes donc bien souvent loin de cette atmosphère faite de recueillement, de concentration et de réflexion. Nous sommes, il faut bien le reconnaître, dans l’univers du divertissement et du spectacle, le livre n’échappant pas ou plus à la règle du marché, faut-il le déplorer ou y voir une solution à la crise de l’édition ?

Parfois, néanmoins, il arrive au lecteur de rencontrer des voix vives et fortes, des voix au talent accompli dans l’art de converser et de conter, comme celles d’André Velter et de Gilles Lapouge. Ils sont parmi les fondateurs du festival Etonnants Voyageurs, contributeurs assidus des publications collectives depuis Pour une littérature voyageuse en 1992, et, en paraphrasant Nicolas Bouvier, des piliers de « la taverne des conteurs orientaux ».

Nous vous proposons d’écouter ici quelques extraits de leur échange sur « l’esprit du voyage », qui manifeste une philosophie et une éthique paradoxales. En guise de discours de sagesse, un gai savoir, et en guise de discipline pratique et normative, un éloge de la perte, où « le voyageur égaré, égarant, jubilant de son égarement » n’éprouve de déception qu’en arrivant au but. Et les deux compères de mettre aussitôt en pratique leur postulat. Le récit des tribulations de Gilles Lapouge dans une Innsbruck imaginaire rappelle une aventure semblable arrivée à un chef viking en Italie pour se continuer par une discussion sur les oiseaux migrateurs, présentés contre toute attente mais avec force arguments comme les figures de « l’anti-aventure ». Il serait trop difficile de retracer le cheminement de cette conversation, il paraîtrait trop incroyable et son sommaire une liste à la Prévert, citons pour le plaisir et dans le désordre qui sied : Bataille, Antioche sur Oronte ou Muktinat, Caillé…

Et pour finir la lecture par André Velter d’un extrait de son dernier livre Midi à toutes les portes, précédée par une brève présentation où il donne l’explication de ce titre.

Jean-François Guennoc

 

image002_7.jpgAndré Velter

Référence bibliographique

Midi à toutes les portes, Paris, Gallimard, Collection Blanche, 384 pages, 21€.
ISBN : 978-2-07-0784420-2
 

Quatrième de couverture

« De Bénarès à Bagdad, de Séville à Surabaya, de Charleville à Chengdu, de Kaboul à Kathmandou, de Louxor à Lhassa, de Makassar à Malacca, d'Islamabad à Jérusalem, de Delhi à Doha, de Paris à partout, la route semble sans fin quand le voyage est devenu l'aimant de la vraie vie. Ce n'est pas là courir le monde, mais choisir un destin sans balise ni appartenance.

Frontières abolies, révoltes revivifiées, émerveillements partagés, on voit ainsi midi à toutes les portes, tout en expérimentant joyeusement le kôan zen : À esprit libre, univers libre ! Car c'est toujours l'heure de partir à l'aplomb du soleil, droit devant, n'importe où, avec l'ardent désir de s'en aller trafiquer dans l'inconnu. »

 

image004_5.jpgGilles Lapouge

Référence bibliographique

Le Bois des amoureux, Paris, Albin Michel, 2006, 320 pages, 20€.
ISBN : 2226173331
 
 

Quatrième de couverture

« La figure du soldat remontait, comme du fond d'un lac, et resplendissante, à mesure que la calèche aux coussins bleus s'élevait dans les tournants qui joignent la gare de Champtercier au village, surtout à partir du bois des amoureux qui forme la frontière, nous le disions toujours, du village. La frontière de notre enfance. Notre bonheur commence et finit au bois des amoureux. Notre tristesse commence et finit au bois des amoureux. Un point, c'est tout ! »

Référence électronique

Jean-François GUENNOC, « L’ESPRIT DU VOYAGE (audio) », Astrolabe - ISSN 2102-538X [En ligne], Juillet / Août 2007, mis en ligne le 27/07/2018, URL : https://www.crlv.org/articles/lesprit-voyage-audio